Que de souvenirs autour de cette omelette ! 

Un des plus anciens est relatif à la présentation de quelques diapositives du restaurant de la mère Poulard1 au Mont-Saint-Michel à l’Amicale alors que les assemblées se déroulaient encore au 1er étage du café de la Couronne au Petit Chêne, ce devait être au début des années quatre-vingts2

Tout ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, remettons-nous dans le contexte de l’époque de la création de cette recette ! 

La marée monte au Mont

 Ce qui est devenu aujourd’hui un juteux business n’était à l’origine qu’un modeste gagne-pain. Annette Boutiaut était entrée, en qualité de femme de chambre, au service de M. Edouard Corroyer, architecte en chef des Monuments historiques, auquel le Gouvernement allait confier la charge de restaurer l’Abbaye du Mont-Saint-Michel. M. Corroyer dut faire des séjours fréquents et prolongés au Mont-Saint-Michel. II emmenait sa femme, sa fille et sa servante. 

 C’est au cours de l’un de ces voyages qu’Annette Boutiaut fit la connaissance d’un brave garçon du pays : Victor Poulard, fils aîné du boulanger. Elle avait alors 21 ans. Ils se marièrent l’année suivante et prirent le bail de l’auberge Saint-Michel Tête d’Or, l’une des 3 auberges du Mont à l’époque. L’Abbaye était désaffectée depuis trois quarts de siècle malgré le demi-siècle d’occupation régulière des services pénitentiaires. Comme l’accès du Mont était à l’époque réputé pour être périlleux, les visiteurs arrivaient au gré des marées à n’importe quelle heure, il fallait donc satisfaire leur appétit aiguisé par 2 à 3 bonnes heures de marche. 


La devanture du restaurant de la Mère Poulard 

 C’est alors qu’Annette trouva l’idée de les faire patienter en leur offrant en un tour de main d’une suprême élégance une omelette de sa confection en attendant le plat principal. Le battage médiatique entourant la visite du pape en 1877 venu couronner la statue de saint Michel devant 20’000 pèlerins, encouragea les touristes à reprendre peu à peu le chemin du Mont. 

 Autour de l’omelette de la Mère Poulard, c’est un cycle de légendes qui s’est formé. Tous les maîtres queux du monde ont émis la prétention d’en révéler le secret. Tel livre de cuisine nous apprendra, par exemple, que Madame Poulard écartait une partie des blancs d’oeufs et ajoutait de la crème fraîche. Erreur : ‘’Pouvez-vous croire, disait l’hôtesse, pouvez-vous penser que j’aurais perdu tous ces blancs ? Non ! Je prenais les oeufs et les battais tels quels. Quant à la crème, pure invention, surtout, nous nous gardions de trop cuire l’omelette, voilà tout mon secret. Du reste, on pouvait -nous voir nous ne nous cachions pas. J’ai eu bien souvent en été vingt à trente curieux autour de moi. Ce n’était parfois pas très commode. Mais puisque ça les amusait !’’ Depuis l’omelette et le Mont-Saint-Michel sont devenu indissociable. Mon dernier souvenir date d’une visite in situ en 20123 avec le quasi-pèlerinage au restaurant de la mère Poulard. 

  1. Une vidéo pour se mettre dans le bain ICI
  2.  Un élève de l’école hôtelière de Lausanne m’avait prêté une dizaine de diapositives du restaurant et de la confection de la fameuse omelette.
  3.  Les 2 photos personnelles datent de cette époque  

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